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«Cela commençait bien! Un nom d’agence comme cela, c’était un bon présage... Les Matins Bleus, ça inspire! Nous sommes d’ailleurs vraiment partis le matin!... avec une voiture toute propre. Qui nous? Un guide (Lalaina), un chauffeur (Eri) et moi. Très sympas dès le départ, ils m’ont amené acheter des chaussettes car je n’en avais pas! «Donc» un programme de visite très souple!!! Sympa, j’en ai profité pour prendre contact avec les travailleurs du quartier.

Imaginais-je que les lavandières laveraient tout mon linge (y compris mes chaussettes) pour un euro?

Ici, nous sommes encore sous l’emprise de l’agitation de la capitale et les enfants nous charment déjà.

La route est excellente et j’interromps souvent cette agréable «glissade» pour me gorger des couleurs et des formes. La pauvreté déchire les vêtements en dentelles de misère pourtant si belles et si gaies... tout comme ce visage d’enfant qui me fuit si promptement.

J’apprends alors choqué et un peu incrédule, que l’on raconte, parait-il assez souvent, que des blancs avaient coutume de dévorer les entrailles des enfants ... On part forcément avec des idées reçues. Il faut alors laisser les paysages, les habitants et leurs cultures nous capter et nous enseigner leur art de vivre. Les rizières, les cultures de manioc, de maïs et de papayes sculptent les terres.

Cette terre qui semble vraiment partir par pans entiers. Même sur les plans horizontaux, l’érosion est terrible: le curetage des anciennes rizières donne leur fertile «matrice» à des fours à briques bancals,

vomissant leurs parallélépipèdes sur les dos d’ados.

Une beauté pharaonique arrive même à percer ces murs épais

qui ne masquent pas encore les joies et les peines de ceux qui qui habiteront ces incroyables maisons à colonnes dans des villages superbes, pourtant si marqués par le dénuement.

Tout de même, il semble que l’on puisse acquérir un terrain juste en le reboisant... mais dans un pays où un mariage heureux doit aboutir à la naissance de 7 filles et 7 garçons, où les femelles lémures ne sont fertiles que deux minutes par an, où les femmes de tous âges, les enfants et les zébus sont souvent les seules «mécanisations» des travaux des champs,

où les brûlis précèdent les brûlis, qui précèdent l’abandon, le paysage est irrémédiablement transformé. L’Homme, même extrêmement humble, exerce une emprise importante sur la nature.

Un peu abasourdi par ce constat, après avoir vu comme unique trace de «modernité» d’énormes antennes,

nous arrivâmes chez Jacky.

Un charmant petit village au toits de chaumes... vite à table! Le Lac Itasy, aux eaux poissonneuses, qui s’étend au-delà de très belles rizières,

ne me fait pas oublier les excellentes roulades de foie gras poêlé,

le magret de canard au confit de gingembre et le jus de goyave...

Heureusement que je n’ai pas voulu voir, sur la route, le «Lemurs Park»! Personnellement, le nom me fait fuir, et j’aurais raté ce délicieux repas.
Après une demi-heure de sieste à rêver à la femme que j’aime, malheureusement si loin, mais qui donne un sens féerique au mot songe, la menace orageuse de cet après-midi de saison des pluies retardée, donne enfin un sens magique aux paysages.

Les contradictions reviennent avec la saturation des couleurs des végétaux et des vêtements, tous si pauvres, désolés et désolants.

Les chutes de la Lily

ne sont qu’un prétexte pour découvrir comment la vie s’organise au long de ces 30 minutes de piste; construction, culture, surveillance du betail, transports

... transports, ceux des corps et ceux du coeur d’un visiteur charmé par ces visages rayonnants.

Le ciel nous promet finalement un coucher de soleil flamboyant. Nous gravissons donc une colline en direction d’un couple de maison de pierres volcaniques (plus de briques!) Une famille paraît-il assez riche (ils possèdent plusieurs zébus) nous accueille.
J’ai toujours été gêné par les démonstrations musicales à l’attention des visiteurs ... même les poétiques «repentistas» de la littérature de Cordel du Nordeste brésilien n’avaient pas réussi à m’apprivoiser... et là, ... et là, merci les enfants, vous êtes merveilleux.

Merci pour cette chorale non improvisée. Cet ensemble musical surréellement mécanique n’aurait pas dû me toucher. Mais derrière cette discipline, j’ai vu votre leader, les timides, les malades, votre mamie se délectant de votre spectacle qu’elle voit peut-être tous les jours.

Visiter votre maison m’a touché. Fouler le sol de terre sur lequel vous dormez m’a gêné. J’ai insisté pour photographier le papa et la maman seuls. Si touchants... Elle, si fière de sa tapisserie de feuilles de magazines, lui, son trésor entre les mains.

Accompagnant la maman et une fille «sur le chemin de l’eau», nous croisons l’autre couple de retour du .... travail. En pleine forme... Moment irréel.

La vue sur le lac est belle mais la ligne de crêtes volcaniques m’attire bien plus. De rares arbres y jouent, sur un drap de crépuscule, le rôle de marionnettes Wayang Kulit (marionnettes de cuir) des ancêtres indonésiens qui peuplèrent l'île... je suis du côté du lac, du côté de l’orchestre de fouets sinistres qui mènent les boeufs dans la vallée... Elle est du côté de ce flamboyant coucher et se lève en repoussant le drap qui nous sépare.

De retour, chez Jacky, après un scrabble avec ses neveux sympas, le foie gras au pok pok (flambé au rhum!) se révèle à moi... pendant le prochain séjour, je ne prendrai que ça à tous les repas!

Aucun moustique n’est venu troubler cette délicieuse nuit baignée de bruits aussi délicats et poétiques que les pensées qu’Elle m’inspire. J’en ai raté la douce lumière du matin, même si le vert tendre des rizières apaise ma relative déception.

Le climat est plus sec qu’à la capitale et la lumière durcit très tôt les traits du paysage. Ceux des visages sont toujours aussi avenants, mais la chaude lumière tend un rai dénonciateur vers les sécrétions nasales épaisses qui maculent les petits visages.

Eh oui, ici pas de cheminées qui pourraient laisser entrer les esprits. La fumée du foyer sort par les interstices des volets rendant certains murs noirs de suie... rendant les poumons... je n’ose y penser en demandant s’il y a des médecins dans la région. Aucun. Bref, nous commençons par une traversée de 35 minutes du lac en pirogue

pour rejoindre l’îlot de la Vierge... qui est une presqu’île. Les crocodiles (invisibles) et la bilharziose, tout aussi discrète mais sûrement plus réelle, font de ces eaux un lieu de baignade ... non recommandé. La belle jacinthe d'eau couleur lavande a, comme sur de nombreux plans d’eau douce dans le monde, commencé à étouffer le lac.

Elle a fait reculer les limites du lac... mais les habitants semblent avoir déjà trouvé des usages à cet envahisseur. Lalaina, ma guide, tu devrais aussi préciser que c’est aussi une des plantes les plus efficaces dans l'épuration des eaux usées... De nombreuses araignées peuplent les fourrés et les ... airs de l’île.

A certains endroits, des milliards de moustiques s’envolent sous mes pas. Du haut du promontoire, un gardien, sa famille et leur minuscule élevage

surveillent la vierge qui, elle, veille sur cette vallée bouchée par une coulée de lave. Re-foie gras au pok pok! Re-sieste aux rêves où veille, avec amour, «ma-Divine-à-moi», et hop, en route vers les geysers. Honnêtement, je dirais «bof les geysers sortis de tubes», et «youppi les paysages

et les rencontres pour y aller».

Au fait, ce jours-là, les geysers furent à l'ombre à partir de 16h30. Avis aux photographes à la recherche de couleurs.

Le retour fut très agréable, les rencontres toujours aussi fascinantes

et la route très peu fréquentée car en semaine. Ah, si! Une caravane d’environ 16 charrettes fuit le soleil couchant ... et moi, je reviens vers Ma... mais c’est une autre histoire!

Voyage au pays des couleurs (ici, badigeonnage de volets à l’huile de vidange)

et du sourire qui doit vous inspirer quelque chose pour votre prochain «Tana»...

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